Max Emanuel Cenčić (Arminio), Lauren Snoufer (Tusnelda), Aleksandra Kubas-Kruk (Sigismondo), Gaia Petrone (Ramise), Juan Sancho (Varo), Owen Willetts (Tullio), Pavel Kudinov (Segeste), Armonia Atenea, dir. George Petrou, mise en scène Max Emanuel Cenčić (live Karlsruhe 24 février et 1er mars 2017).
DVD Cmajor (2 DVD). 2h48. Notice en français. Distr. DistrArt Musique.

 

Deux ans après avoir gravé sur disques une belle intégrale de l’œuvre (voir notre compte rendu), Petrou et Cenčić en proposent une captation scénique effectuée au Festival Haendel de Karlsruhe. Pour l’occasion, la distribution vocale a été en partie renouvelée. La soprano polonaise Aleksandra Kubas-Kruk remplace avantageusement le sopraniste choisi par Decca, affichant des couleurs plus riches mais aussi, parfois, comme beaucoup de voix slaves, une émission un peu droite car placée dans le pharynx – le même problème se pose avec Pavel Kudinov, basse russe qui campe un Segeste puissant mais moins élégant que celui réussi par Ristori (chez Virgin). Pas de réserve concernant l’excellente Gaia Petrone qui vient parfaitement à bout, à force de musicalité, des malcommodes éclats de Ramise : le timbre n’est peut-être pas aussi soyeux que celui de Donose (version Decca) mais la partie est mieux maîtrisée. En revanche, le contre-ténor Willetts nous fait regretter un Sabata nettement plus prenant et on avoue une légère préférence pour la Tusnelda de Leyla Clayre, plus chaleureuse que l’agile Lauren Snouffer, dont la voix ne s’épanouit qu’en cours de soirée. Cenčić reste égal à lui-même (émission large et vibrante, timbre charnu, grave profond, élocution un rien cotonneuse), même si le direct, de façon naturelle, l’éprouve davantage que le disque – mais le rôle est épuisant… Après avoir écouté la version de Cummings, qui paraît simultanément, la direction de Petrou nous a paru un peu trop constamment virile, voire brutale, en début de soirée ; mais les contrastes se creusent peu à peu, les détails expressifs s’affinent et, dès que l’action se charge de pathos, l’oreille est captivée.

La mise en scène de Cenčić n’apporte pas grand-chose : le chanteur-scénographe habille les Germains à la mode Louis XVI, robes à panier et perruques choucroutées incluses, tandis que les Romains portent redingotes et bicornes Directoire. On croit percevoir une vague allusion à la Révolution française derrière cet affrontement qui se termine au pied de la guillotine, mais le propos semble mince – et ce décor de palais vitré qui ne cesse de tourner sur lui-même avant d’être désossé nous a paru bien agaçant. Seule idée originale : faire du couple Ramise/Sigismondo une parodie du couple principal, avec une Ramise alcoolique et un Sigismondo fis à maman, impliqués, au dernier acte, dans une amusante scène de torture… L’œil étant beaucoup moins séduit que l’oreille, nous avons opté pour une note moyenne ; précisons cependant qu’il s’agit de la seule version vidéo disponible d’Arminio.

Olivier Rouvière