Raffaella Milanesi (Fedra), Artavazd Sargsyan (Teseo), Anna Maria Dell'Oste (Aricia), Caterina Poggini (Ippolito), Piera Bivona (Learco), Esther Andaloro (Diana), Sonia Fortunato (Tisifone), Salvatore D'Agata (Mercurio), Giuseppe Lo Turco (Plutone), Orchestre et Chœur du Théâtre Massimo Bellini, dir Jérôme Correas (Catane, 2016)

CD Dynamic CDS 7750. Distr. Outhere.

La tragédie hyperbolique de Racine inspirée d'Euripide et Sénèque a intéressé une dizaine de compositeurs lyriques, de Rameau (Hippolyte et Aricie, 1733) et Lemoine (Phèdre, 1786) aux Italiens du XIXe siècle (Paisiello, Nicolini, Orlandi et Mayr), avant les modernes Pizzetti et Bussotti. Le dramma per la musica de Paisiello, présenté ici comme première discographique mondiale, avait en vérité fait l'objet dès 1958 d'une captation de la RAI distribuée par le label Andromeda. Une version bien peu philologique, dirigée par le très générique Angelo Questa, mais plutôt bien chantée. La présente réalisation se veut plus respectueuse de l'intégrité de la partition et de la typologie vocale originelle des protagonistes, mais les bonnes intentions ne suffisent pas à pallier l'insigne faiblesse de la distribution.

Le brillantissime chef français Jérôme Correas, claveciniste et chanteur de formation, fait tout son possible, quant à lui, pour impulser à l'orchestre sicilien du Massimo la juste discipline et le délié que réclame cette partition. On jugera sans doute cette dernière un rien trop allègre et superficielle pour épouser les passions de héros certes conçus au prisme de la bienséance classique mais brûlant d'un feu que le lieto fine conventionnel contribue de plus à éteindre. Seuls des chanteurs aguerris, dotés de vrais tempéraments, seraient en mesure de rendre crédible ce conflit Eros-Thanatos ici réduit à de pénibles exercices scolaires. Un Ippolito soprano travesti vaut certes mieux que le ténor hier substitué au castrat Crescentini, mais seule une vocalisation altière pourrait le rendre crédible. Une Aricia pointue, une Diana d'intonation incertaine, une Aricia gâtant de son vibrato et de ses pénibles aigus la si belle aria "Se nell'amar", un Teseo assuré mais nasal, n'offrent pas une distribution à la hauteur des enjeux. Phèdre, tout entière à sa proie attachée, en arrive à proférer de bien vilains cris, le tempérament lui tenant trop souvent lieu d'équilibre des registres. Bref: cette reviviscence d'un ouvrage non sans mérites retient l'attention sans vraiment convaincre.

J.C.