Kurt Streit (Tito), Karina Gauvin (Vittelia), Kate Lindsey (Sesto), Julie Boulianne (Annio), Julie Fuchs (Servilia), Robert Gleadow (Publio), Ensemble Aedes, Le Cercle de L'Harmonie, dir. Jérémie Rhorer (2014).

CD Alpha-Classics 270. Notice en français. Distr. Outhere.

Après le récent Enlèvement au sérail, voici la suite des captations sur le vif des Mozart donnés au Théâtre des Champs-Elysées par Le Cercle de l'Harmonie - là encore, sans la dimension visuelle, ce qui ne nous frustre guère, la mise en scène de Denis Podalydès nous ayant paru un peu tiède lors de sa création, en 2014. Quant à l'interprétation musicale, avec le recul du temps et, surtout, des micros, elle n'est plus exactement telle que nous l'avaient transmise nos souvenirs. Certains y gagnent, d'autres y perdent. L'orchestre fait partie des gagnants : assez peu homogène depuis la salle, il paraît ici doté de sonorités plus rondes (côté clarinettes et violoncelles, par exemple). Karina Gauvin, en revanche, pâlit au disque : les rires de sorcière que lui a permis (ou imposés?) le metteur en scène ne passent pas l'épreuve de l'enregistrement, ses graves apparaissent moins sonnants ici et, surtout, on note une certaine nonchalance interprétative que son incarnation scénique avait masquée. Reste un timbre toujours aussi crémeux, des aigus rayonnants et une vraie personnalité vocale, qui se bonifie au second acte. Cela vaut d'ailleurs pour tous les interprètes : à l'acte I, le Sesto solide et sain de Kate Lindsey patauge trop manifestement dans les vocalises de « Parto, parto » et le Tito de Kurt Streit affiche son usure dans un « Ah se fosse intorno al trono » à peine chantonné. Sa voix désormais émaciée, aux harmoniques éteints, convient en revanche aux moments les plus ornés et campe finalement un personnage émouvant, qui semble se raidir contre sa propre fragilité : son grand accompagnato du second acte est sur ce point un modèle. On en remerciera aussi le chef, dont on admire la capacité à entrer immédiatement dans le vif du sujet, à concilier cantabile et dynamique « pré-romantique ». Manque encore à ses Mozart, systématiquement captés en direct, à se policer, à devenir aussi « beaux » qu'éloquents. Mais on a connu Titus plus ennuyeux... D'autant que les seconds rôles sont enthousiasmants : Publio barytonnant mais présent et viril, Annius chaleureux, Servilia délicieuse. Pas une référence, certes, mais un moment en bonne compagnie.

O.R.