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Un concert au Palais Garnier a été l’occasion de retrouver les jeunes solistes de l’Atelier Lyrique de l’Opéra de Paris. Dirigée par Christian Schirm, cette structure sert de tremplin professionnel à de jeunes chanteurs et chefs de chant issus de différents horizons et recrutés sur audition, qui perfectionnent là un travail de fond et en présentent les fruits au gré de spectacles ou de récitals.

Ce dernier exercice n’est pas la situation la plus naturelle ni la plus favorable à ces jeunes artistes, intuitivement plus à l’aise sous l’habit du costume et les apparences de la mise en scène. Ainsi, la seconde partie de la soirée (le finale des Nozze di Figaro), joué à l’avant-scène avec une verve sympathique, était-il plus enlevé que la première, où chacun y va de son grand air dans une succession plus disparate. La longueur du concert a semblé d’ailleurs accrue par la méforme des troupes de l’orchestre de l’Opéra national de Paris, aussi peu précises que peu concentrées parfois et laissées trop souvent en roue libre par la baguette de Marius Stieghorst – attentif aux chanteurs mais trop peu directif, au point d’alourdir dangereusement certains tempi.

La palette des individualités est en tout cas diversifiée. S’il détimbre un peu ses mezza voce, Florian Sempey offre un Figaro (« Largo al factotum ») très vivant et jovial. D’abord tendu et inadéquat en Almaviva (trio « Ah ! qual colpo inaspettato » du Barbier de Séville), Manuel Nuñez Camelino délivre ensuite un Gounod très stylé (l’air de Rodolphe de La Nonne sanglante), timbre certes étroit mais diction et nuances soignées. L’instrument très homogène d’Alisa Kolosova est mis en défaut par Rossini, dont elle noie quelque peu la précision du legato (air d’Arsace « In si barbara sciagura » dans Semiramide), tandis que celui de Chenxing Yuan, pointu et au vibrato serré, dessert le phrasé et l’esprit de Manon, se rattrapant seulement avec des contre-notes en smashes percutants (Gavotte de Manon). Ilona Krzywicka, timbre moelleux et voix bien conduite, fait le choix d’une partition qui nécessiterait une projection plus large (la Salomé d’Hérodiade), mais le fait selon un style châtié. Le Leporello de Damien Pass compense une voix courte par un esprit vif (air du Catalogue), l’Ilia de Zoe Nicolaidou est émouvante (« Padre, germani »), le Comte de Michał Partyka déjà très carnassier sinon puissant (« Hai già vinta la causa »).

Un cran au-dessus, ceux que l’on sent capables de nous emporter comme de futurs grands. Alexandre Duhamel – l’un des nommés dans la catégorie « Révélation lyrique » aux Victoires de la musique classique de l’année – est un cas intéressant, dont le timbre intrinsèquement moins beau que celui de son collègue et compatriote Florian Sempey est servi pourtant par une technique et une élégance impeccables (l’air de Zurga des Pêcheurs de perles). Marianne Crebassa, mezzo moiré et voluptueux, nous suspend à son « Connais-tu le pays » (Mignon) – et y réalise des phrasés de toute beauté en dépit d’un orchestre plombé. Et Carol García, malgré une vocalisation hachurée d’air en Angelina (Cenerentola), nous comble d’un mezzo profond, généreux et bondissant, d’un jeu pétillant et d’une présence rayonnante. A suivre !

C.C.