Paolo Gavanelli (Filippo), Lucia Aliberti (Beatrice), Camille Capasso (Agnese), Martin Thompson (Orombello), John David de Haan (Anichino), Raemond Martin (Rizzardo). Orchestre et chœur du Deutsche Oper Berlin, dir. Fabio Luisi (live, 1992).
CD Brilliant Classics 94679. Distr. Abeille Musique.

Naguère distribuée sous label Berlin Classics, cette captation sur le vif réalisée en juin 1992 à l'occasion d'une série de concerts produits par le Deutsche Oper, nous revient sous étiquette Brilliant. De l'opéra malheureux de Bellini - créé par la Pasta mais désavoué par son librettiste, Romani, boudé par le public en dépit des pépites mélodiques qu'il recèle, et à l'étroit entre Norma et I puritani -, cette intégrale ne mérite aucune ingratitude. Conduit avec flamme et élégance par Luisi, l'orchestre épouse avec vivacité, souplesse et soin du détail instrumental, les pleins et déliés d'une partition offrant un écrin raffiné à la vocalité qu'elle anime. Lucia Aliberti ne s'est jamais vraiment départie de ce mimétisme callassien qui constitue le meilleur et le moins bon d'une identité vocale particulièrement prisée en Allemagne. Le profil de la phrase bellinienne, sa dynamique forte-piano, comme l'émission canalisée dans le masque, garante d'une tenue d'archet à la corde, sont d'une belcantiste avisée. Les sons dans les joues, les suraigus forte instables, parfois à la limite du cri, gâtent un peu notre plaisir, trahissant l'effort d'un organe foncièrement léger. Mieux à son avantage qu'en Rigoletto sans être tout à fait éduqué au style romantique, Gavanelli convainc, comme à son habitude, davantage dans le cantabile morbido que dans l'invective et la véhémence. On sera surpris à son air d'entrée par la grâce aérienne d'une Agnese réservant les couleurs centrales de sa voix de mezzo pour la suite du drame - un mezzo de toute manière assez clair, ce qui peut fausser le contraste voulu avec sa rivale. Orombello bien en voix quoique prosaïque, le ténor Thompson ne dépare point un plateau somme toute satisfaisant. A condition de ne pas convoquer les souvenirs des Sutherland et Horne ou de Gencer, ou encore ceux préservés par le domaine privé - de Gasdia et surtout de Devia. Sans oublier l'Orombello de Pavarotti !

J.C.