OEP621_1.jpg
Geneviève Lévesque (Berta), Julie Boulianne (Rosina), Antonio Figueroa (Almaviva), Armando Noguera (Figaro), Peter McGillivray (Bartolo) et Jamie Offenbach (Basilio).

 

Pour son dernier spectacle de la saison, l'Opéra de Québec a présenté un Barbier de Séville extrêmement réussi dont la première qualité réside dans le formidable esprit d'équipe qui entraîne chanteurs et instrumentistes dans une délicieuse folie. La comédie de Beaumarchais revisitée par Sterbini et Rossini est ici servie par des interprètes qui savent en outre trouver le parfait dosage entre la farce, l'humour et l'émotion. À cet égard, le Figaro d'Armando Noguera est merveilleux de naturel et de drôlerie. Après un superbe Papageno qui a beaucoup marqué le public de Québec en 2015, le baryton argentin campe un barbier truculent à souhait et qui mène véritablement l'intrigue. C'est ce que fait bien ressortir le finale du premier acte, où il redonne vie aux personnages immobilisés qui s'apparentent à ce moment à des marionnettes dont il tirerait les ficelles. À l'exception de quelques sons curieusement placés dans les joues, il projette parfaitement sa voix, qui convient fort bien au rôle.

Également très bonne comédienne, la mezzo Julie Boulianne est une Rosina au timbre charnu, qui se rit des difficultés de la partition et ornemente joliment certains passages, à l'instar de l'Almaviva d'Antonio Figueroa. Si ce dernier, doté d'une couleur vocale très appropriée à Rossini, connaît un début un peu hésitant et éprouve quelques difficultés dans sa cavatine, il se ressaisit à partir de l'entrée de Figaro, comme si le factotum lui prêtait une partie de son assurance. Entre Peter McGillivray et Jamie Offenbach, tous deux impayables en Bartolo et Basilio, la préférence doit être accordée au premier, qui possède la meilleure voix et les plus évidentes qualités musicales. Les rôles de Berta et de Fiorello sont tenus par deux jeunes chanteurs à surveiller : Geneviève Lévesque et surtout Dominic Veilleux, à l'excellente technique vocale et très à l'aise sur scène. Timothy Vernon dirige l'Orchestre symphonique de Québec avec une complicité de tous les instants, particulièrement dans les irrésistibles crescendos.

D'abord donnée par le Pacific Opera Victoria en février 2016, la production regorge de couleurs. Dans un décor Art nouveau aux élégantes formes épurées, Morris Panych sait non seulement animer les foules, comme dans le tableau final du premier acte évoqué plus haut, mais aussi rendre encore plus oppressante la réclusion de Rosina, avec ces nombreux serviteurs qui semblent constamment épier la jeune femme dans chaque recoin de la maison de Bartolo. Grâce à son sens du comique jamais outrancier et à sa fine direction d'acteurs, le metteur en scène réalise un spectacle d'un bel équilibre et d'un remarquable dynamisme.

 L.B.

Notre édition du Barbier de Séville : L’Avant-Scène Opéra n° 37.


OEP621_2.jpg
Armando Noguera (Figaro) et Julie Boulianne (Rosina). Photos : Louise Leblanc.