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Kangmin Justin Kim (Oreste), Marc Barrard (Agamemnon), Gaëlle Arquez (Hélène), Mark van Arsdale (Achille), Gilles Ragon (Ménélas, assis à l'arrière-plan).

 

Pour sa Belle Hélène printanière le Théâtre du Châtelet a convoqué l’équipe scénographique qui avait présidé à La pietra del paragone (2007/2014) et Pop’pea (2012) : Giorgio Barberio Corsetti et Pierrick Sorin. Inchangé et systématique, leur dispositif met hélas à l’honneur plus la mise en scène elle-même que l’ouvrage d’Offenbach : l’insertion des chanteurs filmés au sein de décors projetés en vidéo tient du procédé gratuit, plaqué sans raison ni signification dramaturgique. Entre les écrans suspendus, les mini-décors animés latéralement et les actions parallèles développées en marge des numéros chantés, tout semble fait pour envahir l’espace et le regard aux dépens de l’attention aux interprètes et… de la confiance en la musique. Quant à la direction d’acteurs, elle entraîne une troupe tonique et convaincue vers l’agitation permanente et la caricature forcée, et ce théâtre ne rend pas justice à l’humour délicieux de l’opéra-bouffe d’Offenbach : même les dialogues, menés à grand train, semblent proférés sans que les acteurs aient le temps d’en goûter la saveur.

Accompagnée par un Orchestre Prométhée aux équilibres hasardeux, l’équipe vocale est, elle aussi, inégale. Gaëlle Arquez possède tous les atouts d’une Hélène gourmande, mais son vibrato un peu serré durcit ce qui pourrait être volupté ; Pâris (Merto Sungu) affiche un ténor impossiblement nasal ; comédien vigoureux, Jean-Philippe Lafont est un Calchas solide tant qu’il parle, particulièrement instable désormais lorsqu’il chante ; et il faut supporter en Oreste (un rôle habituellement destiné à un soprano travesti) un Kangmin Justin Kim au timbre fluet et à l’élocution chantée bien floue, qui semble téléporter sur la scène du Châtelet le personnage de gamin capricieux qu’il avait déjà joué dans La Chauve-Souris de l’Opéra-Comique – à moins que ce ne soit son propre personnage. Rois et chœurs remplissent leur office, sans que la soirée leur donne l’occasion de travailler en finesse ou en véritable musicalité bouffe.

Dommage que le Châtelet n’ait pas concédé à Offenbach le luxe dramaturgique et musical auquel il nous a désormais habitués dans le répertoire du musical… qui doit pourtant beaucoup au créateur de La Belle Hélène.

C.C.

A lire : notre édition de La Belle Hélène, L’Avant-Scène Opéra n° 125


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Gaëlle Arquez (Hélène). Photos : Marie-Noëlle Robert / Théâtre du Châtelet.