10 CD Harmonia Mundi (enregistrés de 1981 à 1992). Distr. Harmonia Mundi.

Anniversaire oblige (les deux cent-cinquante ans de la mort de Rameau) : Harmonia Mundi y va aussi de sa compilation, limitée aux enregistrements réalisés par Les Arts Florissants avant qu'ils ne « passent » chez la concurrence (Erato). Disons-le tout net : cette parution ne s'imposait pas. Si les Pièces de clavecin distillées par Christie sont goûteuses et si l'acte de ballet Nélée et Myrthis n'a pas de rival, les deux autres pièces en un acte, Anacréon (le tout premier Rameau des Arts Flo', plein de bonhomie) et, surtout, Pygmalion, ont été mieux gravées ailleurs. Enregistré au lendemain des représentations du Festival d'Aix-en-Provence de 1990, Les Indes galantes révèle un Christie encore bien peu en phase avec les « grandes formes », gourmet mais court de souffle, délicat (magnifiques récitatifs !) mais fort mièvre (le premier disque - Prologue et acte « du Turc » - se traîne lamentablement). Ses forces n'ont pas encore le jarret que réclame le plus kaléidoscopique opéra de Rameau : si les vents de l'orchestre sont divins, les cordes restent bien paresseuses, le chœur minaude et les solistes apparaissent très inégaux (bravo à Howard Crook, Isabelle Poulenard et Nicolas Rivenq, mais on se serait passé de Miriam Ruggeri, Bernard Deletré, Noémi Rime ou Claron McFadden). Reste que Les Indes n'ont pas encore trouvé d'interprète à leur mesure, la seule autre version baroque disponible (celle de Reyne, Musiques à la Chabotterie) manquant elle aussi de panache. Heureusement, il y a Castor et Pollux (1993) : bien que toujours un peu fade (mais plus poétique et moins didactique qu'Harnoncourt), Christie a su rassembler ici une distribution de haut vol, au sein de laquelle le Castor mélancolique d'Howard Crook et la Phébé impériale de Véronique Gens se distinguent particulièrement. Cette seule réédition aurait suffi...

O.R.