Arianna Vendittelli (Idalma), Anita Rosati (Dorillo), Margherita Maria Sala (Irene), Rupert Charlesworth (Lindoro), Juan Sancho (Celindo), Morgan Pearce (Almiro), Rocco Cavalluzzi (Pantano), Innsbrucker Festwochenorchester, dir. Alessandro De Marchi.
CPO 555 501-2 (3 CD). 2021. Notice en anglais. Distr. DistrArt Musique.
 
Passé à la postérité pour ses talents d’organiste et de pédagogue du clavier, Bernardo Pasquini (1637-1710) composa 14 oratorios et 17 opéras – dont une douzaine nous a été conservée. Au disque, on connaissait quelques-uns des premiers (écoutez son beau Caino e Abele, enregistré en 1990 par – déjà – Alessandro De Marchi), mais, sauf erreur, aucun des seconds. Ceux-ci ne connurent pas la même diffusion que les ouvrages vénitiens contemporains, sans doute parce qu’ils furent composés pour des théâtres privés ; car, à Rome, à la fin du XVIIe siècle, les opéras publics étaient fermés sur l’ordre du pape.
 
L’Idalma overo Chi la dura vince (« Idalma ou Qui persiste finit par triompher »), le septième ouvrage lyrique de Pasquini, fut donc créé au palais Capranica en 1680. Son livret s’inspire de celui de L’Empio punito de Melani (récemment enregistré par Carlo Ipata), et, donc, par ricochet, du Burlador de Sevilla de Tirso de Molina. Le mythe de Don Juan s’y voit cependant considérablement affadi, purgé de tout surnaturel : le bellâtre Lindoro a abandonné Irene pour épouser Idalma, mais souhaite revenir à ses premières amours, s’attirant les foudres du frère (Almiro) et du mari (Celindo) d’Irene ; deux serviteurs gaffeurs ne font qu’envenimer l’affaire qui, cependant, se résout pour le mieux.
 
La musique de Pasquini s’inscrit dans l’héritage de Cavalli (aux côtés duquel il s’était rendu à la cour de Louis XIV) et ressemble à celle de Stradella ou du jeune Alessandro Scarlatti : le récitatif se simplifie, les airs se multiplient mais les da capo restent rares, supplantés par les formes strophiques avec ritournelle (et, souvent, sur ostinato, une formule pour laquelle Pasquini avoue un penchant immodéré). Plus copieux que toujours inspiré, l’ouvrage s’avère surtout remarquable pour ses ensembles (beau trio de l’acte I, quintette final, duos sur basse de chaconne) et les monologues polymorphes de l’acte III.
 
Enregistré au fil de représentations du Festival d’Innsbruck, il bénéficie de la direction alerte, virevoltante bien qu’un rien trop élégante de De Marchi. Ce dernier l’a confié à un orchestre confortable et coloré (vingt-deux musiciens), où figurent des instruments qui ne furent probablement pas sollicités à la création, dont deux flûtes à bec et même un colascione.
 
La distribution, jeune, fringante, laisse une impression mitigée : la basse (Cavalluzzi) grommelle par trop et on n’apprécie toujours pas l’émission en arrière et nasillarde du ténor Sancho. Si l’autre ténor (Charlesworth) nasille aussi, sa partie, plus centrale, plus flatteuse, plus fleurie, lui laisse néanmoins l’occasion de charmer. Jolis, un peu fades, le baryton Pearce et le sopranino Rosati ; tandis que, dans l’exigeant rôle-titre, Vendittelli affiche une voix corsée et une belle conviction mais aussi un chant parfois emphatique, peu soigné. C’est à l’alto que vont nos préférences : belle technique, timbre racé, interprétation sentie, Margherita Maria Sala nous vaut les meilleurs moments de cet enregistrement, plus intéressant que bouleversant.
 

Olivier Rouvière