Gaia Petrone (Sabina), Omar Montanari (Don Petronio), Fabio Capitanucci (Trifoglio), Giorgio Misseri (Claudio), Manuela Custer (Anastasia), Claudia Urru (Rosaura), Daniele Lettieri (Anselmo), Orchestra e Coro Gli Originali, Stefano Montanari, dir et fortepiano. Enreg. sur le vif Festival Donizetti Bergame 2020. Msc. Davide MarranchelliAnna Bobomelli (d.), Linda Riccardi (c.), Alessandro Carletti (l.).
Dynamic CDS 57908 ( 1 DVD ) 119’. Notice en italien et en anglais. Pas de livret. Distr. Outhere. 

Rien de ce qui est donizettien ne saurait échapper aux artisans du festival de Bergame, Covid ou pas, et cette captation réalisée en l’absence de public en est une démonstration. Aller rechercher ces Nozze in Villa, troisième opéra d’un compositeur de 24 ans présenté sans succès en 1819 à Mantoue et qui depuis n’a guère refait surface, n’allait pas de soi. Partition originale disparue, quintette du deuxième acte évaporé et qu’il aura fallu réinventer, sinon à la lettre du moins dans l’esprit, le travail accompli est méritoire.

Le jeu en valait-il la chandelle et ces noces ne nous laisseraient-elles pas sur notre faim ? Livret et musique ne sont ici en vérité que stéréotypes plus ou moins habilement recyclés par l’élève du cosmopolite Mayr, en miroir des opéras bouffes de Rossini, à partir d’un livret inspiré du sulfureux allemand August von Kotzebue. Les figures obligées prévalent dans cette histoire concoctée par l’incontournable Merelli. On y rencontre un certain Don Petronio (basse), désargenté, désireux de marier sa fille Sabina (mezzo) au nommé Trifoglio, maître d’école redondant ( baryton). Au terme de péripéties diverses et variées celui-ci s’effacera devant le riche Claudio (ténor) qui épousera la belle sans dot. Il faut reconnaître au spectacle coloré qui nous est offert un réel charme décoratif. Les deux cygnes géants constitués de ballons d’un blanc virginal, et dont les longs cous dessinent en se rapprochant un cœur métaphorique, donnent le La d’une mise en scène naïve, joliment illustrée. Ainsi de la gondole vénitienne, de la pièce montée fleurie ou de l’inscription L’amor è nell’aria en contre-plongée d’une prise de vue lunaire. L’héroïne de ces jeux de l’amour et de l’argent, Sabina, en est aussi la photographe et les tient à portée d’objectif tout au long du spectacle. Gaia Petrone, éduquée aux vocalités croisées de Porpora, Vivaldi ou Rossini, domine aisément le plateau. Timbre homogène, vocalises rapides sans faiblesses, la mezzo compense par son abattage vocal le relatif effacement théâtral auquel on l’assigne. On goûtera particulièrement sa cavatine « Sospiri del mio sen » au premier acte et l’aria du second « Non mostrarmi in tale istante ». D’une partition encombrée de recitativi secci et de volatine un rien mécaniques, ne se détachent par ailleurs que le trio inaugural du II, conclu par une strette imaginative, en plus de quelques soli bien venus et du fameux quintette recomposé. Las ! l’orchestre, faible en ses cordes mais bien animé par Montanari, est plus que de raison en décalages fréquents avec les chœurs, les modestes seconds rôles et les autres protagonistes. Ainsi d’Omar Montanari, à l’occasion un Leporello autrement en situation, de Capitanucci dont le Trifoglio n’est que l’ombre de ses Belcore ou Enrico de la Lucia donizettienne. Le ténor, qui finalement embrassera la chère Sabina, étreint mal une ligne vocale que son timbre plat et une émission serrée altèrent fâcheusement. Ouvrage du second rayon, agréable à l’œil, parfois l’oreille : à chacun de juger sachant qu’une version CD gravée en 1994 par Opera rara offre un élément de comparaison non négligeable.

Jean Cabourg