Mauro Borgioni (Acrimante), Sabrina Cortese (Atamira), Michela Guarrera (Ipomene), Giacomo Nanni (Bibi), Carlotta Colombo (Cloridoro), Alessio Tosi (Delfa), Alessandro Ravasio (Atrace), Reate Festival baroque Ensemble, dir. Alessandro Quarta ; mise en scène : Cesare Scarton.
Dynamic (1 DVD). 2h16. 2019. Live. Notice en anglais. Distr. Outhere.

En octobre 2019, deux productions différentes de cet opéra d’Alessandro Melani (1639-1703) virent le jour en Italie : l’une à Pise (dont nous avons précédemment commenté l’écho discographique, paru chez Glossa), l’autre à Rome. Si la captation de cette dernière nous parvient après celle de sa rivale, elle fut réalisée dix jours plus tôt, le 2 octobre – ce qui autorise l’éditeur à clamer fièrement sur la pochette « First performance in modern time » et « World premiere on video »… Ce n’est pas la dimension visuelle du spectacle qui nous retiendra : réalisée à l’économie, la scénographie (une série de praticables sur fond bleuté) et les costumes (mêlant robes de soirées, uniformes d’apparat, Rangers et blousons de cuir) sont assez laids, et seule la direction d’acteurs, habile bien que non dépourvue de trivialité, justifie la parution en DVD. Avouons néanmoins que cet Empio punito, prédécesseur du Don Giovanni de Mozart daté de 1669, gagne à être vu sur scène plutôt que simplement écouté, du fait d’un livret et d’une musique passablement morcelés. Alessandro Quarta ne manifeste pas à l’égard de cette partition encore tout imprégnée du style de Cavalli le respect assez mortifère manifesté par Carlo Ipata à Pise : il y taille largement (trois personnages et un quart de la musique disparaissent) et ne se prive pas de transposer le rôle-titre, écrit pour castrat, à l’intention d’un baryton. On ne s’en plaindra pas car la voix vibrante et sensuelle comme l’interprétation enflammée de Mauro Borgioni confèrent un véritable relief à son « grand seigneur méchant homme ». Les autres chanteurs, à l’exception de l’excellent Alessio Tosi en vieille nourrice, sont plus modestes : des trois sopranos, deux, Cortese et Colombo, affichent des timbres bien secs et si la troisième (Guarrera) possède une voix plus pulpeuse, elle détonne fréquemment. Quant à Giacomo Nanni, Bibi mordant mais un peu vert (le rôle est fort raccourci), il a manifestement été choisi davantage pour sa plastique avantageuse, qui nous vaut un strip-tease final, que pour sa projection. La direction de Quarta se révèle plus expressive que celle d’Ipata, soulignant l’allant féroce de l’air « Tormentose faville » comme la mélancolie imprégnant l’air final de l’acte I ou le lamento d’Atamira « Morte finisci un di ». Si la basse continue (placée très en avant des voix par la prise de son) se montre souvent brutale, l’ensemble baroque ici réuni nous a paru plus fourni et investi que celui d’Auser Musici – on y remarquera l’usage efficace du basson, absent de la précédente réalisation.

Olivier Rouvière