Miriam Portmann (l'impératrice Marie-Thérèse), Jevgenij Taruntsov (Franz), Verena Barth-Jurca (la princesse Adelgunde, alias Bichette), Gerhard Balluch (le comte Kaunitz), Clemens Kerschbaumer (le comte Pepi Cobenzl), Gabriele Kridl (la comtesse Fuchs). Chœur du Festival Lehár de Bad Ischl, Orchestre Franz Lehár, dir. Marius Burkert (live, 14-16 août 2014).
CPO 777 915-2 (2 CD). Notices et synopsis en allemand et en anglais. Distr. DistrArt.

Créée en octobre 1915 au Metropoltheater de Berlin avec la fameuse Fritzi Massary, cette Kaiserin de Leo Fall s'inspire de la pièce Maria Theresia (1903) de l'auteur autrichien Franz von Schöntan. On l'aura compris, l'impératrice dont il est ici question est la grande Marie-Thérèse, que l'opérette présente dans sa relation amoureuse avec François de Lorraine, d'abord peu de temps avant leur mariage en 1736, puis quelques années plus tard, alors que la souveraine soupçonne à tort son mari d'infidélité. Sur cette intrigue particulièrement mince, Fall a composé une partition bien pauvre en regard de ses principaux titres que sont Der fidele Bauer (1907), Die Dollarprinzessin (1907), Die Rose von Stambul (1916) ou encore Madame Pompadour (1922). D'un ouvrage en grande partie phagocyté par d'interminables dialogues dénués d'intérêt pour un auditeur non germanophone privé du livret, bien peu de mélodies nous restent en tête, si ce n'est « Du mein Schönbrunn », chanté par la souveraine au deuxième acte et que Lucia Popp enregistra jadis sous la direction de Charles Wildmann.

Si le Festival Lehár de Bad Ischl a droit à notre gratitude en proposant cette nouvelle intégrale, force nous est de constater que ce coffret ne peut soutenir la comparaison avec l'ancien enregistrement que Franz Marszalek avait réalisé en 1953 à Cologne avec Anny Schlemm et Franz Fehringer (Line Music). À la tête d'un orchestre peu subtil et d'un chœur manquant d'homogénéité, le chef Marius Burkert accomplit une tâche d'autant plus ingrate que les solistes ne se hissent guère au-dessus de la médiocrité. La Marie-Thérèse de Miriam Portmann possède certes puissance et force de caractère, mais sa voix malmenée et sans charme véritable rappelle de façon assez troublante l'instrument fatigué de Gwyneth Jones dans le Ring de Boulez. Tout comme dans Die ungarische Hochzeit de Dostal, le Franz de Jevgenij Taruntsov est carrément inacceptable en raison d'un timbre particulièrement terne, d'une justesse approximative et d'aigus fort laborieux. Du reste de la distribution se démarque heureusement la Bichette rafraîchissante et pleine de joie de vivre de la soprano Verena Barth-Jurca, qui constitue la seule véritable source de satisfaction de cet album en définitive bien décevant.

Louis Bilodeau