Arles, Actes Sud/Classica, 2017, 163 p., 16,80 €

Après Chopin (2014) et Robert Schumann (2010), voici le troisième ouvrage qu'Alain Duault publie chez Actes Sud/Classica. Devant la pauvreté désolante de livres français consacrés à la dynastie des Strauss, on ne peut que se réjouir de cette parution dans laquelle le poète et romancier nous prouve une nouvelle fois à quel point il est un merveilleux conteur. Sous sa plume alerte, le récit biographique va droit à l'essentiel, nous tient constamment en haleine et s'insère dans une évocation colorée de la Vienne du XIXe siècle. Si les qualités d'écriture et l'enthousiasme contagieux d'Alain Duault face au sujet emportent l'adhésion, on se montrera cependant plus sévère en ce qui regarde la valeur musicologique de cette monographie. Une première constatation s'impose : en douze petits chapitres et un postlude totalisant un peu moins de 100 pages, le panorama est forcément fragmentaire et ne laisse guère de place à une analyse fouillée de « l'esprit de la valse ». Le nombre de pages de la collection est réduit, c'est entendu, mais pourquoi avoir inclus une chronologie de 44 pages, où il est fort peu question des Strauss et qui nous apprend, par exemple, que Ventre Saint Gris a gagné le prix du Jockey Club en 1858 ou que, à la suite d'un ouragan ayant déferlé sur le Zanzibar, le prix du clou de girofle a fortement augmenté en 1872 ?

Plus graves nous apparaissent quelques erreurs qui auraient dû être corrigées avant l'impression. La plus grosse bourde consiste probablement à attirer - deux fois plutôt qu'une ! - l'attention du lecteur sur le fait que Johann Strauss fils aurait dirigé la création de Tristan et Isolde à Vienne, en 1861... L'orchestre de Josef Strauss a certes donné cette année-là des extraits de l'opéra de Wagner, mais c'est bien sûr Hans von Bülow qui le créa à Munich quatre ans plus tard. De  même, ce n'est pas à Vienne, comme l'affirme Alain Duault, mais plutôt à Freiberg qu'est né Sigmund Freud. Par ailleurs, Mahler a monté La Chauve-Souris à l'Opéra de Vienne en 1897 et non pas en 1894. Cette année-là, c'est Johann Nepomuk Fuchs qui se trouvait dans la fosse ; Mahler, qui n'estimait guère la musique du « roi de la valse », dirigea l'œuvre une seule et unique fois à Vienne, le 31 octobre 1897. Enfin, on peut s'étonner de ne pas retrouver dans la bibliographie deux ouvrages importants sur la valse, ceux de Fritz Klingenbeck (Unsterblicher Walzer, 1940) et de Remi Hess (La Valse : révolution du couple en Europe, 1989).

L.B.