Inva Mula (Mireille), Charles Castronovo (Vincent), Franck Ferrari (Ourrias), Alain Vernhes (Maître Ramon), Sylvie Brunet (Taven), Anne-Catherine Gillet (Vincenette), Sébastien Droy (Anderloun), Nicolas Cavallier (Maître Ambroise), Amel-Brahim Djelloul (Clémence), Ugo Rabec (Passeur). Chœur et Orchestre de l’Opéra national de Paris, dir. Marc Minkowski (Paris, Palais Garnier, 11n 12 & 14 septembre 2009). Mise en scène : Nicolas Joel.
Naxos. 2 DVD. Présentation bilingue (angl., fr.). Distr. Outhere.

Cette Mireille inaugurait le mandat sans éclat de Nicolas Joel à la tête de l’Opéra de Paris. Événement doublement symbolique : le répertoire français, que son prédécesseur Gérard Mortier n’avait d’ailleurs pas totalement négligé, reprenait tous ses droits, les productions iconoclastes n’avaient plus droit de cité. Pour enfoncer le clou, le nouveau directeur se réservait la mise en scène de l’opéra de Gounod. Mal lui en prit, bien qu’il s’abstînt ensuite : la tradition, ici, n’était que ringardise. Si le réalisme des décors passait, sauf celui du Val d’enfer, d’une laideur visqueuse, la direction d’acteurs, d’un autre âge, prêtait parfois à sourire par sa naïveté de patronage, échouant surtout à créer de vrais personnages.

La musique, heureusement, était beaucoup mieux servie et le chant français honoré, même par les interprètes non venus de l’Hexagone. Certes un peu tendue à partir du quatrième acte, Inva Mula incarnait une belle Mireille, bien projetée sur toute la tessiture, avec un aigu sûr et une ligne joliment galbée, entre fraîcheur candide et grands accents dramatiques. Le Vincent de Charles Castronovo lui était assorti par la qualité du timbre et l’élégance du chant, il assumait les tensions du Val d’enfer, qui mettent à la peine des ténors trop légers. Franck Ferrari séduisait moins : quelque fruste qu’il soit, le jaloux Ourrias doit-il offrir un chant aussi brut ? Sylvie Brunet, en revanche, ne débraille pas sa Taven, d’autant plus impressionnante qu’elle n’est pas caricaturale – vocalement du moins. Autour d’eux, tous sont excellents, même si la tessiture de Vincenette reste un peu centrale pour la délicieuse Anne-Catherine Gillet : parfait berger ténor et non plus travesti de Sébastien Droy, Ramon usé mais superbe d’Alain Vernhes, à la violence stylée, Ambroise plein de relief de Nicolas Cavallier, Clémence lumineuse d’Amel-Brahim Djelloul, Passeur imposant d’Ugo Rabec. Marc Minkowski dirige en chef de théâtre, crée une tension et des atmosphères, très attentif aux couleurs de l’orchestre de Gounod.

La production est ce qu’elle est, mais chanteurs et chef nous rappellent, s’il en était besoin, que Mireille est un chef-d’œuvre.

Didier van Moere