Elia Fabbian (Guglielmo Wulf), Maria Teresa Leva (Anna), Leonardo Caimi (Roberto), Tony Laudadio (le Narrateur), Chœur et Orchestre du Mai Musical Florentin, dir. Marco Angius, mise en scène : Francesco Saponaro (Florence, 25.X.2018).
Dynamic 37840. Notice et synopsis en ital./angl. Distr. Outhere.


Première œuvre lyrique d’un Puccini de 25 ans, Le Villi fut composé sur un livret de Ferdinando Fontana pour participer au concours lancé par l’éditeur Sonzogno en 1883. Le palmarès laissa Puccini bredouille, mais on monta néanmoins son ouvrage, alors en un acte, en 1884 au Teatro Dal Verme de Milan, avec succès. Le rival de Sonzogno, Ricordi, fondit sur les droits de la partition et incita le compositeur à la rallonger pour atteindre deux actes.

Anna, délaissée par son fiancé Roberto que séduit une courtisane lors d’un séjour à Mainz, meurt de chagrin. Il sera emporté par les Willis, esprits vengeurs des jeunes filles abandonnées. Le premier acte nous montre le départ en voyage de Roberto ; le second, le village en deuil d’Anna ; charge à un narrateur, pendant l’intermezzo orchestral, de nous raconter ce qui s’est passé entretemps. Si la patte de Puccini est déjà reconnaissable, notamment par sa volupté orchestrale et sa plasticité mélodique, reste que les personnages – peu nombreux : Anna, son père Guglielmo et son fiancé Roberto – ne sont qu’esquissés et, surtout, que le principal de l’action (Roberto à Mainz, la mort d’Anna) est relégué hors-champ, dans l’ellipse temporelle qui sépare les deux actes : problème crucial qui rend l’opéra dramaturgiquement bancal.

Après une première version vidéo de très piètre qualité musicale autant que théâtrale (Tivoli 2006, chez ArtHaus Musik), voici une nouvelle captation venue du Mai Musical Florentin 2018. La frustration est à peine moindre, hélas. Croit-on suffisant de consacrer aux Villi des moyens limités en raison de son rang de « coup d’essai » dans la carrière de Puccini ? Chœurs déplaisants (sopranos trémulantes), ténor court dans l’aigu et en défaut de soutien, baryton au chant fruste et faux, chorégraphie inepte mal masquée par des éclairages dont la pénombre se veut en vain mystérieuse, mise en scène oublieuse du minimum syndical (les chœurs, la direction d’acteurs) – c’est pitié. Le chef n’a pu apparemment sauver son plateau vocal, et mène sans grand entrain un orchestre parfois erratique. On sauvera Maria Teresa Leva, Anna bien plus honnête que ses collègues et rendant justice au chant puccinien sinon parfaitement, du moins avec intégrité.

Chantal Cazaux