León de la Guardia (Arvino), Pavel Kudinov (Pagano), Anna Werle (Viclinda), Ania Jeruc (Giselda), Daniel Dropulja (Pirro), Christoph Wittmann (le Prieur de Milan), Andrew Nolen (Acciano), Marian Talaba (Oronte), Kate Allen (Sofia), Czech Philharmonic, Choir Brno et Capella Aquileia, dir. Marcus Bosch (Heidenheim, live 15-20/07/2018).
SACD Coviello Classics COV91901. Notice et synopsis bilingues (angl., all.), livret trilingue (ital., angl., all.). Distr. UVM.


Après l’Oberto de 2016 et le Giorno di regno de 2017, voici les Lombardi alla prima crociata du Festival de Heidenheim 2018 captés par les micros du label Coviello. La direction vive et nette de Marcus Bosch, tout comme sa programmation en tant que directeur artistique du festival témoignent de la probité de sa démarche. Probité qui se retrouve dans une distribution que l’on sent (globalement) attentive au style, mais qui ne peut rivaliser avec les hauteurs de prestigieux devanciers (par exemple Pavarotti et Scotto réunis à Rome en 1969 : live dir. Gavazzeni). Si l’orchestre paraît tenir son Verdi « de jeunesse » (1843) – avec en outre un très beau violon solo pour la scène du Baptême –, les chœurs, quoiqu’honnêtes et élégants, avouent un manque d’italianità certain. Certains comprimari sont franchement insuffisants : le Prieur, pincé (mais le rôle est minimal), ou Arvino, sans soutien (c’est plus gênant car le personnage est bien plus sollicité). Quant aux trois protagonistes, ils mêlent qualités et failles. Le plus satisfaisant est sans doute le Pagano noble et digne de Pavel Kudinov, auquel on voudrait simplement plus d’envergure et de mordant. Mais l’Oronte de Marian Talaba déploie son ténor au prix d’une émission comprimée aux limites de la caricature (son chant « d’outre-tombe » est forcé, difficultueux, tuant tout le charme surnaturel de la situation), provoquant aigus poussés et intonation en défaut ; et du rôle redoutable de Giselda (laquelle doit alterner juvénile tendresse et furia vocale digne d’une reine donizettienne), Ania Jeruc ne possède que la première facette : délicate, certes, donc à son affaire dans la cantilène douce et flottante ; mais, manquant de flamboyance et de graves assis, elle élime son bas-médium dans les cavatines et son chant de bravoure est peu percutant.

Portés par le théâtre (la mise en scène de la production revenait à Tobias Heyder), tous trouvaient peut-être l’espace nécessaire pour compenser ces limites par l’investissement scénique. Le disque seul les met au contraire au premier plan.

Chantal Cazaux