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" Broadway Rhythm ".

Huit mois après sa création in loco (lire ici), la production « made in France » de Singin’ in the Rain revient au Châtelet, cette fois pour 50 représentations et auréolée de la promesse de bientôt se transporter à Broadway, comme l’a fait entre-temps et avec succès An American in Paris.

Si le chef est nouveau (l’Orchestre Pasdeloup sous la direction de Stephen Betteridge convainc d’ailleurs un peu moins que l’Orchestre de chambre de Paris, en mars, sous celle de Gareth Valentine), si le double rôle de Dora Bailey / Miss Dinsmore échoit désormais à Emma Lindars, tout aussi pétulante que l’avait été Jennie Dale, le reste de la distribution est inchangé et l’on retrouve avec un plaisir renouvelé les héritiers des mythiques Gene Kelly, Donald O’Connor et Debbie Reynolds : Dan Burton (Don Lockwood), Daniel Crossley (Cosmo Brown) et Clare Halse (Kathie Selden) n’ont pas à pâtir de la comparaison et triomphent, tout comme Emma Kate Nelson (Lina). Ils mêlent leur charme, leur talent et leur abattage à une œuvre tout simplement formidable de rythme et de poésie, où chaque chanson (toutes sont signées Nacio Herb Brown et Arthur Freed) se hisse au chef-d’œuvre, et dont la production parisienne offre une vision au chic fou. L’univers scénographique créé par Robert Carsen (mise en scène), Tim Hatley (décors), Anthony Powell (costumes) et Stephen Mear (chorégraphie) rivalise d’intelligence (dans la façon d’envisager le « modèle indépassable » qu’est le film de Stanley Donen et Gene Kelly), de magie théâtrale et de beauté visuelle.

En mars, cette production signait l’arrivée du printemps. En ce mois de novembre endeuillé, elle constitue un vibrant éloge du plaisir – plaisir de chanter sous la pluie et à tue-tête, plaisir de danser en tenue sexy et à paillettes, plaisir d’écouter un charleston frénétique en sentant son tressautement nous envahir, plaisir de rêver dans le monde merveilleux des fictions de théâtre ou de cinéma, plaisir de sauter dans les flaques d’eau au nez et (surtout) à la barbe de monsieur l’agent, plaisir de s’embrasser sous un réverbère… On aime penser qu’avec ce spectacle, la Ville Lumière adresse un clin d’œil complice et ému à celle Qui Ne Dort Jamais, et suit le précepte de Cosmo : « The show must go on » – surtout quand il est le sel de la vie. « Broadway rhythm » et French Art-de-vivre, même combat !

C.C.

A retrouver dans nos éditions : La Comédie musicale, mode d’emploi d’Alain Perroux.


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" All I Do is Dream of You". Photos : Marie-Noëlle Robert / Théâtre du Châtelet.