Erna Berger (Lady Harriet), Peter Anders (Lyonel), Else Tegetthoff (Nancy), Josef Greindl (Plumkett), Eugen Fuchs (Lord Tristan), Franz Sauer (le Shérif de Richmond). Orch. de la Staatskapelle de Berlin, chœur de l'Opéra d'État de Berlin, dir. Johannes Schüler (1944).
CD Brilliant Classics 94681. Distr. Abeille Musique.

Octobre 1944 : alors que Berlin connaît des heures parmi les plus sombres de son histoire, le chef Johannes Schüler enregistre à la maison de la radiodiffusion (dans le Westend), une version de Martha qui respire le bonheur et la joie de vivre. Peut-être pour tenter d'exorciser un tant soit peu les horreurs de la guerre, musiciens et chanteurs se lancent dans une interprétation irrésistible d'entrain, d'ardeur et de tendresse. Peu importent les coupures, la distorsion occasionnelle ou le chœur parfois un peu maigrichon, puisque c'est l'essence de l'œuvre qui éclate ici à chaque instant. Comment en outre ne pas fondre en écoutant Erna Berger, à la voix si fraîche, dans son rôle de jeune Lady qui se fait prendre au jeu de l'amour ? Son interprétation de la fameuse romance « Letzte Rose » est tout simplement anthologique. On peut en dire tout autant de l'air « Ach so fromm » de Peter Anders, ténor aux moyens immenses, capable d'exprimer aussi bien la fougue de la passion que le désespoir du jeune homme qui se croit trahi par celle qu'il aime. Dans une forme splendide, Josef Greindl est un Plumkett de grand luxe, tandis que la merveilleuse Else Tegetthoff chante Nancy à ravir. Voilà un enregistrement qui fait honneur à un opéra délicieux et qui prouve avec éloquence que du chaos peut émerger la plus ravissante beauté.

L.B.