José Cura (Manrico), Dmitri Hvorostovsky (le Comte di Luna), Yvonne Naef (Azucena), Verónica Villaroel (Leonora), Tómas Tómasson (Ferrando). Orch. et Ch. Du Royal Opera House Covent Garden, dir. Carlo Rizzi, mise en scène : Elijah Moshinsky (Londres, 3.V.2002).
DVD Opus Arte OA MO 6010 D. Distr. DistrArtMusic.

Le Trouvère n'est pas l'opéra de Verdi qui a le mieux inspiré les metteurs en scène ; quant à sa distribution, on le sait, elle réclame des voix d'exception. Cette captation londonienne datant déjà de 2002 mais qu'Opus Arte remet aujourd'hui à l'honneur n'est pas négligeable, en ce qu'elle distille des plaisirs vocaux et scéniques sinon idéaux du moins équilibrés. Elijah Moshinsky translate l'argument à l'époque du Risorgimento, lui conservant ainsi sa noirceur tout empreinte de combats militaires, son goût de révolte et de sang. L'austérité des décors de Dante Ferretti sert cette atmosphère tendue, comme un théâtre plutôt bien aiguisé : le premier duel opposant Manrico et le Comte affiche, de la part des interprètes, une animosité étonnante et, aux moments périlleux du camp bohémien ou de la scène finale, la production évite soigneusement la tentation du kitsch pour se concentrer sur la direction d'acteurs. Avec un Ferrando au timbre de bronze mais au vibrato très oscillant, le quatuor de tête se défend : malgré son manque de juvénilité et de grâce dans les couleurs, Verónica Villaroel ose une Leonora sur le fil, aux nuances intimes ; s'il s'écoute beaucoup chanter et multiplie les effets en divo satisfait, le baryton de Dmitri Hvorostovsky est bien ce qu'il faut à un Comte mordant et viril ; corsé, sombré même, José Cura est un Manrico endurant - plus exclamatif que bien chantant néanmoins ; Azucena de beau rang, retenue, d'Yvonne Naef. L'orchestre du Royal Opera House est mené avec une flamme altière par Carlo Rizzi. Le tout, malgré ses imperfections, constitue une bonne référence moderne dans la vidéographie du Trouvère.

C.C.