Woong-Jo Choi (Oberto), Anna Princeva (Leonora), Katerina Hebelkova (Cuniza), Adrian Dumitru (Riccardo), Daniela Bahasova (Imelda), Cappella Aquileia, Tschechischer Philarmonischer Chor Brünn, dir. Marcus Bosch (live 2016).

CD Coviello classics COV 91702. Distr. UVM Distribution.

Le jeune chef et directeur musical du festival de Heidenheim (Wurtenberg), Marcus Bosch, a certainement raison de contenir le premier opéra de Verdi dans les limites d'une approche chambriste, pimentée d'instruments d'époque et dévolue à une distribution de jeunes chanteurs invités à ne pas surjouer ce drame médiéval musicalement tempéré. C'était déjà l'option privilégiée par Michael Hofstetter devant les 700 spectateurs de son théâtre de Giessen en 2012 (Oehms). On a toutefois le sentiment que la présente production fait de nécessité vertu et qu'une grisaille cultivée à la scène par le régisseur se reflète dans la vocalité des interprètes. L'air d'entrée de Riccardo donne ainsi du ténor roumain qui l'incarne l'image sonore d'un comprimario aux voyelles ouvertes, aux aigus étroits, plus que du primo uomo de filiation donizettienne (au demeurant donné comme baryton dans le générique du booklet !). Une fragilité qui le dessert particulièrement quand vient le moment de sa romance « Ciel che feci » dont le lyrisme appelle une tout autre morbidezza. Des leçons reçues de Grace Bumbry le registre grave de la soprane russe distribuée en Leonora a tiré un meilleur profit que l'expansion des notes aiguës forte, incertaines d'intonation. Accordons-lui cependant un sens assez juste de la ligne, une habileté à négocier ses cabalettes, compensations d'une prestation trop scolaire. Le nécessaire contraste avec Cuniza supposerait que celle-ci affirmât davantage une certaine noirceur quand elle ne peut faire valoir que l'ardeur de ses accents (gâtés par sa prononciation) et la plasticité de son discours. La très séduisante mezzo à qui échoit le rôle de la confidente Imelda est aussi plus transparente que de raison. Oberto ne convoque pas une basse hyperbolique et, en ce sens, est bien servi ici par un artiste phrasant et vocalisant avec retenue, y compris dans l'expression de son « Orror del tradimento ». Tout ceci ne confère pas au drame de Solera le supplément d'ardeur dramatique qui lui fait défaut et à laquelle un Verdi encore inexpérimenté ne supplée qu'imparfaitement, mais se laisse écouter. A condition de ne pas avoir en mémoire cette autre captation allemande évoquée supra, d'un meilleur étiage vocal.

J.C.